J'avais envie de vous faire partager une petite expérience professionnelle où j'ai pu mêler boulot et plaisir.
Pour situer le contexte, je suis infirmier en addictologie (demandes de consultations à adresser en MP

En parallèle je suis mordu de golf.
Comme j'avais la chance de bosser avec un médecin qui me laissais tester mes idées, un jour j'ai laissé germer l'une d'entre elle : et si j'emmenais mes patients au practice du golf municipal ? Bon bien sûr je suis loin d'être un professionnel, mais j'ai de bonnes qualités pédagogiques et mon diplôme d'éducateur sportif... en football !
Bon je rassure tout le monde, j'ai immédiatement écarté l'objectif d'enseigner le golf à mes patients pour en faire des joueurs parfaits. J'ai imaginé des objectifs beaucoup plus modeste golfiquement parlant, mais très intéressants de mon point de vue de soignant :
- prendre du plaisir en découvrant quelque chose de nouveau. Dans le cadre des addictions, la dépendance se traduit notamment par un abandon progressif de toutes les autres formes de plaisir. Oser s'ouvrir à une nouvelle activité que l'on pensait inabordable a quelque chose d’extrêmement stimulant pour nos chers petits neurones.
- travailler la motricité-coordination. Celle-ci est souvent très altérée dans le cadre d'addictions à des produits (le pire pour ça étant l'alcool). Le golf me paraissait particulièrement adapté, car il nécessite un lien important entre la tête et tous les membres, sans pour autant demander un effort physique violent (pas de demande de performance ou de longueur de balle). L'idée dans ce cas est de simplement travailler sur le ressenti du balancier, la prise en main d'un club, la capacité à se positionner dans l'espace et enfin la mise en place dans le but de simplement toucher la balle.
- travailler la gestion des émotions. Celle-ci est elle aussi souvent perturbée dans le cadre des addictions. S'essayer au golf, c'est travailler sur l'acceptation de ces petits échecs : et non on ne touchera pas la balle à chaque fois, et non elle ne partira pas à 150 mètres dès le premier swing (ou rarement), et non elle ne rentrera pas forcément dans le trou à chaque putt. La frustration engendrée doit être gérée. Mais les émotions positives aussi. Quand le plaisir des premiers contacts avec la balle arrive, que faire de cette décharge dopaminergique ?
- travailler la concentration et la capacité d'apprentissage. Comme je l'ai dit plus haut, je n'ai en aucun cas la prétention d'enseigner le golf. Mais je pense être capable d'expliquer à quelqu'un comment tenir son club, comment ressentir le phénomène de balancier engendré par la tête du club ou les règles de base pour réaliser un putt. Dans les addictions (notamment celles avec produit), les capacités de concentration et d'apprentissage sont altérées. Au travers du golf il me semblait possible d'évaluer et de travailler ces capacités.
- améliorer la confiance en soi. L'addiction est une pathologie chronique. Les rechutes amènent à une perte de l'estime de soi et de la confiance en soi. Le golf a (malheureusement) une image d'un sport inaccessible. En tant que joueur je sais que ce n'est pas vrai. J'ai imaginé qu'en les amenant sur le practice, en leur montrant qu'ils pouvaient réussir à faire partir la balle (même si ce n'est que de 20 ou 30 mètres), ou à la rentrer dans un trou sur un putt, celà pouvait les valoriser et les aider à reprendre confiance en eux.
J'ai donc écrit un projet indiquant tous ces objectifs et fait un devis à Décath. J'ai eu le feu vert de ma hiérarchie et obtenu pour 250 € de matériel !
C'était il y a environ deux ans. Et aujourd'hui je peux vous dire que tous ces objectifs que j'avais imaginé étaient adaptés. J'ai pu réellement travailler tout cela avec un bon nombre de patients et en plus ils en redemandaient !
Il y a une semaine j'ai changé de poste et je n'irai plus mener cette activité, mais je peux vous dire que cette expérience a été très enrichissante et une très grande source de plaisir pour moi.