Après avoir joué pour la première fois ce parcours mythique, j'avais écrit un compte rendu de ma journée et je viens de tomber dessus. Il m'a donc paru judicieux de vous le faire partager ici.
THE OLD COURSE EXPERIENCE
L’histoire commence en juin 2003. Après un séjour en Ecosse et y avoir joué le New Course et le Jubilee Course de St Andrews, je me dis qu’il faut vraiment y retourner une fois pour cette fois-ci affronter le plus célèbre parcours du monde : le Old Course. Après m’être renseigné, je sais qu’il est déjà trop tard pour pouvoir assurer un départ en 2004… Qu’importe, je tenterai ma chance en 2005, l’année du retour du British Open dans le « Home of Golf ». En mars 2004, j’envoie ma réservation pour juin 2005, en sachant que la réponse ne tombera pas avant le début de l’automne, sans garantie qu’elle soit positive, puisque c’est un système de souscription. Quinze mois à l’avance, ça peut paraître complètement invraisemblable, mais ça reste le meilleur moyen pour avoir l’assurance de jouer ! Puis fin septembre arrive cette enveloppe qui m’annonce la bonne nouvelle : tee time réservé pour le vendredi 10 juin 2005 à 15h40 ! Je vais pouvoir marcher sur les traces de ceux, anonymes et célèbres, qui ont déjà affronté ce parcours où le golf y est pratiqué depuis 600 ans, et ce juste avant la venue des stars de la PGA en juillet pour l’Open. En dehors du voyage en lui-même à organiser, il me reste encore un détail crucial à régler : grappiller les deux petits points d’index qui me manquent pour atteindre les 24 absolument indispensables pour jouer en ce lieu historique ! Ca sera chose faite durant les semaines qui suivent.
Samedi 4 juin, je pars en Ecosse en compagnie de Manue, ainsi que de Laurent, l’ami qui jouera avec moi le Old Course. Nous visitons ce magnifique pays en faisant deux parcours « d’échauffement » avant d’arriver à St Andrews le mercredi soir. Le lendemain, nous nous attaquons au Jubilee Course. Pour beaucoup de locaux, c’est le plus difficile des six parcours que compte le St-Andrews Links Trust ! Et ce n’est pas ma carte de score qui va le démentir… Pas très rassurant à la veille du moment fort du voyage, mais peu importe, chaque jour est un autre jour !
Arrive finalement le grand jour. Le ciel est assez bas, le vent modéré et la température très fraîche pour la saison. Pas de doute, nous sommes bel et bien en Ecosse ! Une certaine impatience nous amène très tôt aux alentours du départ. Il y a toujours beaucoup de monde, que ça soit les joueurs qui attendent leur tour, ceux qui espèrent pouvoir se glisser dans la place libre d’un flight ou tout simplement de nombreux touristes et passants. Au pied du célèbre club house du Royal and Ancient Golf Club et de l’immense tribune montée pour le prochain Open, cela donne vraiment une ambiance particulière. Et une grosse pression pour le premier drive !
Comme notre départ est réservé pour Laurent et moi uniquement, le starter demande si nous acceptons que deux personnes sur sa liste d’attente se joignent à nous. Nous acceptons évidemment, et nous voilà en compagnie d’un Américain ainsi que d’un Canadien vivant aux Philippines, arrivé de Manille le matin même ! Et bien sûr Manue qui nous accompagne et est chargée d’immortaliser cette journée. Comme il y est vivement recommandé quand on s’y attaque pour la première fois, nous recourrons à des caddies. Rien de tel pour profiter pleinement de ce parcours et éviter ses innombrables pièges. Enfin, du moins une partie d’entre eux…
Il est temps maintenant d’y aller. Question de fierté personnelle, il est hors de question de massacrer mon drive devant autant de public ! La pression est donc bien là. Mon coup part assez rasant et à gauche (il ne restera pas dans les annales) mais profite ainsi pleinement du fairway partagé avec le dix-huitième trou (le plus large du monde). Cela dit, la qualité du gazon aidant, ma balle s’arrête l’air de rien quelques 270 mètres plus loin. Censé ne pas être un soucis depuis le tee, elle faillit même terminer sa course dans le Swilcan Burn, le seul obstacle d’eau du parcours. Malgré une approche hasardeuse, je termine ce trou avec un bogey tout à fait satisfaisant. Nous avons le vent dans le dos, c’est déjà ça de gagné pour l’aller ! Mon drive du 2 termine dans les buissons nous séparant du New Course, ça sera une des deux seules balles que je perdrai. Contrairement aux idées reçues, le rough n’est pas si terrible que ça. Par contre les greens sont eux d’une rapidité vraiment impressionnante.
Sur le trou 5, un des deux seuls par 5, mon deuxième coup ouvre le compteur des visites de bunkers, en compagnie de Laurent qui a trouvé de bon goût de m’y suivre. Collé contre un « mur » de plus de deux mètres, je n’ai d’autre choix que de droper ma balle. Mais je ne suis pas encore dehors ! Heureusement, un seul coup inspiré me permet de sortir de ce piège abyssal. Au trou suivant, mon drive part à gauche toute. C’est d’ailleurs le leitmotiv de ma journée. Mais ce n’est pas si grave, le danger est toujours à droite sur ce parcours. Me voilà donc sur le bord opposé du fairway du 11, avec encore plus de 150 mètres à parcourir, en devant survoler une zone de rough très épais, parsemée de buissons et bunkers, ainsi qu’une tour de télévision déjà en place pour l’Open. Suivant à la lettre les conseils de mon très bon caddie, mon coup de fer 6 survole sans soucis la zone dangereuse, prend légèrement le vent, touche l’entrée du green et va s’arrêter à trois petits mètres du drapeau. Je ne tremble pas et rentre mon putt pour birdie !
Au 8, seul par 3 de l’aller, ma balle repose en bordure de green, mais à quelque trente mètres du drapeau ! Je putt en espérant surtout ne pas m’arrêter trop loin du trou. C’est le cas, ma balle s’y arrête à 20 centimètres… Il faut avoir beaucoup de qualités pour dompter ce parcours (dont je n’en ai sans doute pas le dixième), mais savoir gérer de très long putts auxquels nous ne sommes pas habitués peut être une arme indispensable sur ces greens immenses. Surtout que les avant-greens et les fairways sont tellement ras qu’on putt bien plus souvent qu’on chip pour les atteindre. Je termine l’aller dans un honorable +11, malgré deux pénalités. A titre de comparaison, certains pros participant au récent Open ont rendu une carte de +7 après 9 trous !
Je continue ma marche en avant sur le 10, par 4 de 291 mètres. Arrivé aux abords du large green partagé avec le 8, je cherche sans succès ma balle que je sais longue suite à un très bon drive. Mon caddie m’indique qu’elle est tout simplement déjà sur le green ! La joie d’atteindre pour la première fois le green d’un par 4 en un coup est vite atténuée quand je vois l’ampleur de la difficulté qui me sépare de la fin de ce trou. Ma balle est à environ 70 mètres du trou, avec des pentes dans toutes les directions ! Même Tiger s’y perdrait ! Dans un registre technique absolument inconnu de ma part, je me lance. Ma balle slalome au gré des déclivités, pour terminer sa course folle à quelques six mètres du trou. Le plus dur est fait mais il va encore falloir batailler pour sauver le par. Le putt pour birdie frôle l’objectif mais, comme très justement dit par mon caddie, c’est finalement un très bon « trois putts ». Je perds une dernière balle dans un épais buisson au trou suivant, le second et dernier par 3. Je ne le sais pas encore, mais c’est le début de ma traversée du désert. Et l’utilisation de ce mot n’est malheureusement pas vaine ! Dans le même temps, le ciel se dégage enfin et le vent, que nous aurions eu de face désormais, tombe. Ce petit coup de pouce de la nature n’est pas pour autant utilisé à sa juste valeur sur les trois trous suivants. Au 12, j’ai besoin de trois coups pour sortir du « Stroke Bunker », puis au 13, il me faut cette fois-ci six essais pour m’extraire du « Coffins Bunker » (coffin veut dire cercueil...) avant de devoir encore utiliser à deux reprises mon sandwedge dans « Grave Bunker » sur le 14… On ne peut imaginer dompter (à mon niveau évidemment) un tel parcours sans qu’il vous ramène tôt ou tard à la réalité des choses. Cruelle expérience, dont je préfère en rire à regarder mon caddie s’affairer longuement à ratisser mes « dégâts ».
Mon jeu et mes esprits retrouvés sur les deux trous suivants, nous voilà sur le tee de Road Hole, le 17, souvent considéré comme le trou le plus difficile du monde : un par 4 de 400 mètres, un long drive à l’aveugle au-dessus de la remise du Old Course Hotel pour tenter d’attraper un étroit fairway fuyant sur la droite en diagonale, un green large mais très peu profond, au contraire du terrifiant bunker qui le garde et qui a ruiné les espoirs de tant de candidats à la victoire lors de l’Open. Et bien sûr derrière et en contrebas, la route, en jeu, qui vient crucifier ceux qui n’auraient pas su arrêter leur balle. Lors de l'Open cette année là, le trou était seulement 15 mètres plus long pour les pros et il afficha une moyenne de score de 4.63 ! Face à cet alléchant programme, la tension revient au galop. Viser par-dessus un bâtiment est quelque chose d’assez peu commun. Les impacts dans la paroi de bois en attestent d’ailleurs, mais il est hors de question de rejoindre le club de « maladroits ». J’évite le piège, mais sans honneur, en tapant une fois de plus un drive qui fuit à gauche en direction du fairway du 2. Au bout du compte, je manque lamentablement un putt d’un mètre qui m’aurait offert un bogey plus qu’honorable sur ce trou terrible.
Reste maintenant le 18 qui nous ramène devant le club house baigné par la douce lueur du soleil couchant. Comme sur le drive du 1, je profite pleinement de la largeur de cet immense fairway en partant une fois encore à gauche. Mais cette fois-ci, avec une gratte, le coup est très moyen et ne franchit même pas Grannie Clark’s Wynd, la rue ouverte à la circulation faisant intégralement partie du jeu qui traverse le fairway. Nous faisons évidemment une petite pause photos sur le fameux Swilcan Bridge. Manue est mise à rude contribution pour immortaliser cet instant avec les appareils de chacun ! Mon long second coup au bois 7 m’amène à vingt mètres à gauche du green, à une cinquantaine de mètres du drapeau. Comme souvent cet après-midi, je sors le putter pour m’approcher du drapeau. La balle avale l’avant green, grimpe rapidement la pente, vire finalement à droite comme escompté pour venir mourir à dix malheureux centimètres du trou… Je reçois des applaudissements de la part de quelques spectateurs encore présents à cette heure avancée. Hilare, je leur adresse en retour un petit salut « de golfeur ». Le par est une formalité, le parcours se termine sur cette belle note. Mon score final (+29) est finalement bien secondaire par rapport à la joie d’avoir pu jouer ce parcours de légende. Nous allons ensuite boire quelques pints pour savourer cette très belle journée à St Andrews, the Home of Golf.
Le Old Course n’est pas le plus beau parcours du monde, il n’est pas non plus le plus difficile, mais il ne se dévoile pas facilement et il existe quelque chose de mythique en ses lieux qui mérite vraiment d’être vécu au moins une fois !
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Cette conclusion est tellement vraie que j'y suis retourné en 2009, et l'histoire est assez drôle. L'idée de base était de le jouer avec ma femme cette fois-ci. En septembre 2008, j'envoie ma souscription pour juin 2009. A notre surprise et déception, on reçoit un courrier quelques semaines plus tard nous annonçant que les dates escomptées sont déjà toutes réservées... Tant pis, on remettra ça une autre fois. Quelques mois plus tard, nous nous fiançons, fixons la date du mariage le 20 juin ainsi qu'une semaine de lune de miel officieuse consacrée à jouer au golf en Suisse. En février, je reçois un courrier du St Andrews Links Trust annonçant que ma demande initiale avait été mise en liste d'attente et qu'au final, j'avais obtenu un départ le vendredi 26 juin ! Une chance incroyable car nous avions fixé la date de notre union sans avoir tenu compte de notre demande de réservation, partie aux oubliettes. C'est donc en temps que très jeunes mariés que nous avons eu la joie de (re)jouer le Old Course. Sur le tee 1, ma femme était littéralement terrorisée par l'endroit, le "public", etc, je ne l'avais jamais vu comme ça, même pas au moment de dire oui quelques jours avant !

Bref, je la rassure comme je peux et je suis aidé par un de nos collègues de jeu qui foire totalement sa mise en jeu. Et voilà qu'elle nous drive un missile de plus de 180 mètres au milieu du fairway qui provoque un "wouah" de surprise de mon caddie. Au 2, elle signe un birdie, comme on dit chez nous, "ça c'est fait" ! S'en suit 4 heures de bonheur golfique sans égal ! Après le parcours, nous allons boire quelques pints au Chariots, un pub à portée de sandwedge du green du 18 avec Ryan, un américain qui a partagé notre partie. Pendant que je remets ma montre et mon alliance, il me demande depuis combien de temps nous sommes mariés. Le plus sérieusement du monde, je compte à haute voix sur mes doigts et lui réponds "Six days". Je crois qu'il ne s'en est toujours pas remis, tellement il était étonné et trouvait ça si fantastique de jouer ce parcours comme lune de miel !!! Une petite anecdote qui restera gravée à jamais dans ma mémoire !
Bref, St Andrews est une endroit magique, même pour les non golfeurs, car cette ville est très jolie et très sympa !! A refaire !
